Célébration du vendredi Saint

Collège

Célébration du vendredi Saint

Les SDF sont des personnes comme vous et moi

Cédric, Barbara, Abdelatif, Joseph... ces morts de la rue … Ils avaient 40, 58, 62 ou 22 ans. Ils sont morts anonymement sous une tente, sur un banc, dans un parking ou près d’une gare. On ne connaît rien d’eux ou presque, de quoi leur vie était faite. C’est un peu de leur histoire et de leur vie que l’on a tenté de retracer le 30 mars en France pour 535 d’entre eux, avec le collectif « les Morts en France » et dans beaucoup d’écoles de l’Enseignement Catholique, par différents hommages en leur mémoire.

A l’exemple de John Moore, dit « John l'Anglais » comme le surnommaient les habitants de Saint-Germain, décédé dans la nuit du 28 au 29 décembre 2020, près d'un immeuble où il avait pris l'habitude de dormir dans des couvertures. Les habitants disent qu’il avait un doux regard bleu, maintenant éteint. Des cérémonies, des messes, des temps de prière ont eu lieu partout en France pour promettre de ne pas les oublier.

Dans le livre d’Ésaïe (Esaïe 58:7), la Bible dit : « Partage ton pain avec celui qui a faim, Et fais entrer dans ta maison les malheureux sans asile; Si tu vois un homme nu, couvre-le, Et ne te détourne pas de ton semblable. »

En accord avec sa devise « à chacun, chaque jour, sa part de réussite », l’Ensemble Scolaire Sainte Elisabeth s’est mis en mode « harmonie », afin de rendre sa devise applicable à la réalité suivante : ne pas oublier ceux et celles dont la rue est le « domicile fixe», dans la mesure où Jésus a dit : « j'ai eu faim, et vous m'avez donné à manger ; j'ai eu soif, et vous m'avez donné à boire ; j'étais étranger, et vous m'avez recueilli ; j'étais nu, et vous m'avez vêtu ; j'étais malade, et vous m'avez visité ; j'étais en prison, et vous êtes venus vers moi » (Matthieu 25, 35-36).

Sur une initiative proposée par la DDEC d’Aix, conjointement avec les valeurs humaines, chrétiennes et spirituelles qui font la raison d’être de l’éducation intégrale de notre Ensemble Scolaire Sainte Elisabeth, nous avons voulu faire d’une pierre deux coups. D’une part, honorer par une célébration priante particulière les noms de 25 personnes emportées l’années dernière par les conséquences d’une vie dans la rue et rendre ainsi visibles à la conscience de nos jeunes que vivre dans la rue peut toucher des hommes, des femmes, des adolescents, des enfants, des bébés dans la plus grande indifférence. Dans l’Espérance, d’autre part, que vivre ce moment essentiel le Vendredi Saint marque le développement d’un autre regard sur ceux et celles qui vivent sans un toit.

En effets, Le Vendredi saint est un jour de deuil, où les chrétiens commémorent le procès et la mort de Jésus sur la croix. Il nous rappelle le don que Jésus a fait de sa vie pour le monde, afin que personne ne soit oublié. En acceptant librement de mourir, il nous faut comprendre que ce don par Jésus de sa vie ne s'impose pas. C’est un choix ! La liberté d'aimer ou non, selon le modèle de Dieu, d’y croire ou non est à ce prix !

Dit autrement, honorer la mémoire des défunts de la rue, le jour du Vendredi Saint montre que Dieu ne peut que donner son amour pour tout être humain, y compris pour les personnes sans domiciles fixes. C'est si difficile à croire parfois, tant elles sont victimes de clichés coriaces que la société porte sur elles (« Ils ne veulent pas travailler », …). Mais Dieu n'est pas comme nous. Son Amour n’a qu’un but : leur rendre leur dignité d’être humain. Les morts violentes, les morts de la COVIS-19, …, nous effraient, font la une des médias. Cependant qui parle de ces oubliés ? Oubliés de leur proches quand ils en avaient, oubliés de beaucoup, si loin de tout, mourant souvent dans l’anonymat sans leur nom sur leur sépulture ? Cette célébration aura été pour Sainte Elisabeth, l’occasion divinement providentielle de leur donner une vraie visibilité dans nos cœurs, particulièrement aux adultes et jeunes ayant participé à ce moment intense et profond. Visibilité d’ailleurs poussée jusqu’au bout, dans la mesure où le bol de riz de cette année s’est réalisé pour une association locale dont le combat pour la vie se situe cœur même de la pauvreté et de la misère quotidienne, dont les personnes de la rue font malheureusement partie intégralement : le Secours Catholique des Pennes Mirabeau. Une opération consistant à faire un effort alimentaire pour ceux qui n’ont pas à manger en abondance. Expérience complétant à plus forte raison les valeurs de l’éducation intégrale que nous donnons aux jeunes sous notre responsabilité. En résumé, des paroles de Samia, SDF sur Paris, disent l’essentiel : « Que des gens viennent me parler, je me dis : ah quand même ça existe ! Discuter ça me fait du bien. Ça me met du baume au cœur et ça me fait plaisir d’entendre des voix de mes contacts, et de discuter avec eux. Ça permet de ne plus se sentir seule. »

Hervé DEBAILLEUL, APS de l’Ensemble Scolaire Sainte Elisabeth.